Christophe PONSSON
Catégorie : Superstock 1000 – Championnat du Monde
Team : Team MRS Kawasaki
Parce qu’il faut s’intéresser à ceux dont on ne parle que trop peu, OffBikes a décidé de se pencher sur le cas d’un jeune talent qui monte, qui monte, et qui éclaire la catégorie Superstock 1000 d’une lumière nouvelle, celle de la jeunesse. À seulement 17 ans, Christophe Ponsson débarque dans cette catégorie et compte bien y porter très haut les couleurs du Luxembourg. Quelles-sont ses chances d’y parvenir et pourquoi devriez-vous garder un œil attentif sur cette recrue d’Adrien Morillas ?
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Le passé, rétrospective.
Du fait de son jeune âge, la carrière moto de Christophe Ponsson se résume assez rapidement. C’est en 1998, alors qu’il n’a que 3 ans, qu’il tient son premier guidon entre les mains, celui du PW50 de sa grande sœur. Quatre ans plus tard, le jeune garçon se met au cross, encadré par non moins que Stéphane Chambon, qui pilote alors dans l’écurie Supersport de son père. En 2004, âgé de 9 ans, Christophe disputera six courses du Championnat de Belgique de Pocket Bike sur un Pollini 50RR. Jusqu’en 2009, où il atteint enfin l’âge de 13 ans, il se contentera de courses de karting pour patienter, et remontera en selle pour s’entraîner pendant environ deux ans. C’est enfin en 2011 qu’il est engagé par le Team MRS en Superstock 600, catégorie dans laquelle il court sa première course sur le circuit d’Assen, à l’âge de 15 ans et 3 mois.
En 2012, lors du premier championnat qu’il dispute dans sa totalité, Christophe se classe 14ème.
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L’avenir, les enjeux de la saison 2013.
Malgré son potentiel déjà grandement visible les deux dernières années en Superstock 600, Christophe Ponsson cumule en apparence les difficultés pour cette saison 2013.
Il y a son âge, pour commencer. Encore mineur, il a certes tout le temps de progresser, mais difficile pour lui de s’imposer dans un paddock ou la moyenne d’âge avoisine les 25 ans. Comme il l’affirme lui-même, il a tout intérêt à « prendre la roue » de pilotes plus expérimentés pour se faire la main, et à marquer des points à chaque course pour gagner en crédibilité. Car, au delà de coups d’éclat ou d’exploits de type podiums, seule un grand régularité pourra faire de lui un pilote remarquable cette année. À son âge, personne ne lui pardonnera de passer la plupart du temps dans les bacs à gravier, si toutefois c’est l’option qu’il choisit. Mais le jeune garçon n’est pas du genre à détruire gratuitement des machines : peu de chutes sur ses deux dernières saisons en 600 et des résultats en progression constante, il a prouvé que le fait d’être encore adolescent était un avantage. Meilleure capacités d’apprentissage, appréhension diminuée, il fait partie de cette génération qui fait tout plus vite que tout le monde.
Ensuite, son arrivée dans une nouvelle catégorie, le Superstock 1000. Il y rejoint ses deux coéquipiers, Romain Lanusse et Jérémy Guarnoni, deux pilotes très attendus dans le Top 10 cette année. Pourtant, Christophe est confiant : dès sa première course à Aragon, le voilà qui égale en course les chronos qu’il a effectué en qualification, et qu’il se bat pour la onzième position. Des débuts sur les chapeaux de roues qui se concluent par deux premiers petits points au Championnat. Les nouvelles motos, Christophe, ça ne lui fait pas peur. Et puis quand on est encadré par Adrien Morillas depuis ses débuts en course, peut-on encore avoir peur de quelque chose ?
Sa taille, pour conclure. 17 ans et 1,88m, c’est certes commun en 2013, mais ça n’a rien d’aisé pour régler une moto et encore moins une machine de cette cylindrée – comme nous le confiait Loris Baz dans son interview il y a quelques semaines. Pourtant, le jeune luxembourgeois en fait un atout. D’après lui, peu importe la carrure tant qu’on sait « bouger sur la moto ». S’il le dit, on ne peut que le croire quand on observe ses résultats.
Elle est peut-être là, la qualité qui fait de Christophe Ponsson un jeune pilote prometteur : avec lui, ce qui a l’air d’un obstacle à première vue devient une force, une particularité qui le rend unique, un peu marginal. Et du haut des ses 17 printemps, il assume cette unicité sans ciller, comme lorsqu’il choisit par exemple de représenter le Luxembourg, un pays qui se traverse en quarante minutes – sûrement moins avec une 1000cc, et qui n’a jamais eu de pilote moto dans toute son Histoire.
Pour 2013, le jeune prodige affirme ne pas avoir d’objectif précis et prendre les courses « une par une, comme elles se présentent ». Alors si nous devions nous permettre de lui offrir un enjeu, ce serait de ne pas se gâcher. Parce que le talent et la maturité conjugués de cette façon dans le corps d’un adolescent, c’est suffisamment rare pour qu’on veuille en profiter longtemps.
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L’entrevue.
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Quelles sont tes impressions après cette première course à Aragon ?
C’était vraiment pas mal. L’année dernière en 600 Superstock, j’avais beaucoup de mal à me mettre dans le rythme et à rouler dans les chronos de qualification. Ce week-end, dès le premier tour j’ai roulé dans mon temps des qualifications, donc c’est plutôt bon signe. Cela dit, je ne suis jamais totalement satisfait de moi-même, et même si j’ai marqué mes premiers points dès ma première course dans cette catégorie, j’ai quand même fait deux petites erreurs qui m’ont coûté trois places… Au mieux, je me battais pour la onzième position. Je ne pense pas que ça se soit vu sur les images, mais on était un bon groupe à se battre pour ses places là, et à force de se tirer la bourre, on a fini par se gêner un peu. Je n’ai pas réussi à rester dans le bon wagon, disons que j’ai été gêné au mauvais moment.
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On sait que ton Jérémy (Guarnoni, NdR), ton coéquipier, a eu pas mal de problèmes mécaniques durant tout le week-end. Est-ce que tu as subi le même genre de soucis ?
Oui, Jérémy a eu des soucis avec l’avant de la moto en particulier. Personnellement, j’en ai eu vendredi matin, lors de la première séance libre et au début de la première séance qualificative. Mais j’en ai parlé tout de suite à Adrien (Morillas, Team Manager, NdR) et on a très vite trouvé une solution. Le souci, c’est que Jérémy fait environ une quinzaine de centimètres de moins que moi, du coup il ne peut pas utiliser mes réglages… Ma taille influe trop sur la moto. Mais elle n’est pas pour autant un handicap, au final, un 1000cc c’est très lourd et très puissant, donc ça n’est pas plus mal.
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Dès 2011 pour tes premières courses en Superstock 600, tu as intégré le Team d’Adrien Morillas et son bataillon de pilotes Français dont certains très talentueux, comment te sens-tu dans cette structure, considérant que tu es le plus jeune ?
Le team a gagné en 600 avec Jérémy, donc on sait que c’est une bonne équipe. Avec les autres pilotes, l’entente est plutôt bonne… Je n’irais pas jusqu’à dire qu’ils sont comme de la famille non plus. Mais disons qu’on arrive à se parler, on communique sur certains réglages par exemple. Après comme je te disais, vu nos différences de tailles à tous les trois, je ne peux pas trop me baser sur eux et inversement. Mais d’après moi, le Team MRS est vraiment bien pour cette catégorie. Le truc, comme tu l’as signalé, c’est que je suis encore jeune alors j’ai encore le temps d’apprendre, je peux même faire encore trois ou quatre saison dans cette catégorie au grand pire… Mais évidemment l’objectif final serait de me faire repérer pour le Superbike ou les Grand Prix. Je ne pourrai pas non plus faire six ans dans une même catégorie comme Sylvain Barrier, par exemple, même s’il n’a pas eu de chance parfois. Honnêtement je pensais qu’il serait en Superbike rapidement… Moi, je ne voulais pas stagner en 600, je voulais rapidement passer sur une 1000 et j’ai réussi. Pour l’instant c’est le principal.
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On parle beaucoup de financement lorsqu’un aborde les pilotes Français ou les pilotes jeunes comme toi. Comment ça se passe pour toi au sein du Team MRS ? Est-ce que tu en es encore au stade où tu dois payer pour rouler ?
Comme tous les pilotes, j’ai la chance d’avoir mes parents derrière moi, et ils m’aident financièrement depuis très jeune. Et puis mon père a eu un team en Supersport il y a quelques années (GIL Motorsport, NdR) ce qui fait qu’il connaît du monde et qu’il arrive à trouver quelques personnes à droite à gauche pour me donner de petits budgets… On parle des Français, mais je crois que c’est compliqué pour tout le monde à ce niveau là. Honnêtement, j’aimerais être indépendant financièrement le plus rapidement possible, avoir le support d’une marque ou d’un constructeur pour ne plus avoir à compter sur l’argent de mes parents. Ce serait idéal, parce que ça coûte très cher, et je ne pourrai pas continuer éternellement comme ça.
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Avant la Superstock, tu as fait d’autres sports, et notamment du karting. Est-ce que tu as envisagé, à un moment donné, de faire carrière dans un autre sport que la moto ?
Non. Pour la petite histoire, j’ai commencé par le cross, comme je pense la majorité des pilotes. Lorsqu’ensuite je suis passé au karting, c’était seulement pour patienter et attendre d’avoir l’âge de rouler sur de grosses cylindrées en moto. En réalité, mon père m’a toujours empêché de rouler en deux temps, parce qu’il trouvait ça complètement inutile de faire plusieurs années sur ce type de machine et de devoir ensuite m’adapter aux quatres temps. Et je l’en remercie, car aujourd’hui on voit bien qu’on se dirige vers le quatre temps dans toutes les catégories… Et quand on voit combien l’adaptation est difficile, comme avec Arnaud Vincent dont la carrière s’est terminée avec les deux temps (ou avec Mike Di Meglio qui a été Champion du Monde 125cc mais a peiné ensuite en Moto 2, NdR), je ne peux lui en être que reconnaissant. Donc mon objectif a toujours été la moto. Très jeune pourtant, j’aurais eu l’occasion de faire de la course automobile, à 12 ans je faisais des essais dans des voitures de courses, on m’a proposé de me coacher jusqu’à mes 18 ans, de me subventionner etc. Mais non. Et puis niveau moto, il faut dire que j’étais bien entouré, avec des pilotes comme Stéphane Chambon ou Fabien Foret qui roulaient pour mon père, à l’époque, et qui m’ont pris en main quand j’avais encore 5 ou 6 ans !
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Qu’est-ce que cela t’a apporté, justement, d’être encadré par de tels pilotes dès ton plus jeune âge ?
Je ne suis jamais passé par les Championnats de France, j’ai commencé directement en 2011 par le Supertock 600, donc par le niveau Européen, et je savais d’avance que ça ne serait pas facile tous les jours. Donc avoir l’appui de pilotes comme Fabien ou Régis (Laconi, NdR) m’a permis de prendre un peu plus de recul. Je suis passé par des moments où j’étais très contents, et d’autres où j’ai été mal à en pleurer… Ces gens là pour moi ce sont des anciens, il faut les écouter, et c’est forcément un atout de travailler avec eux.
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Tu représentes les couleurs du Luxembourg alors que tu es francophone, est-ce que tu considères cela comme un avantage ou un inconvénient ?
Depuis l’âge de 7 ans, je vis au Luxembourg, j’ai été à l’école au Luxembourg, mon père y a travaillé… Je suis le premier pilote moto à les représenter, donc pour eux, c’est quelque chose de bien. Mais sur le plan médiatique, ça n’est pas forcément un avantage. La presse Luxembourgeoise ne s’intéresse pas nécessairement à la moto, même si je porte les couleurs du pays, et la presse Française me boude un peu parce qu’elle ne peut pas vraiment m’assimiler aux pilotes Français… Au départ, je pensais que ça me faciliterait les choses, qu’être le premier pilote de leur Histoire pourrait m’aider à débloquer des budgets ou autres pour la saison. Et finalement… On y arrive petit à petit mais seulement maintenant. Par exemple, l’année dernière au Nurburgring, RTL (l‘équivalent Luxembourgeois de TF1, NdR) est venu tourner un reportage dans notre équipe, et pour nous, c’était déjà un grand pas !
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Considérant qu’il n’y a pas de circuit moto au Luxembourg, pour toi, quel est ton grand prix national ?
Pour moi, c’est le Nurburgring. Ça n’est pas très loin du Luxembourg, à peine 150km, donc c’est là que toutes les personnes qui nous aident et nous financent se réunissent et viennent nous voir. C’est ma grosse course de la saison et probablement mon circuit préférée. La seule autre course qui me fait presque autant rêver, c’est Monza, parce que si le tracé n’a rien exceptionnel en lui-même, les grands murs, l’environnement… J’aime beaucoup. Vivement !
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La prochaine course du championnat a lieu à Assen, circuit où tu as disputé ta toute première course en 2011. Comment te prépares-tu et comment le sens-tu ?
Déjà, j’arrive sur un circuit sur lequel j’adore vraiment rouler. Pleins de grands virages où on rentre avec beaucoup de vitesse, beaucoup d’appui, on peur remettre les gaz très tôt… Donc je pars en sachant que je vais me faire plaisir, donc que je devrais rouler vite. Car ce n’est pas forcément quand on est concentré sur le fait de faire un chrono qu’on roule vite, le plus souvent, c’est quand on prend du plaisir qu’on fait les meilleurs temps. Après, mon but est surtout de continuer d’apprendre, parce que je reste le plus jeune de la catégorie, donc je vais prendre des roues et essayer de progresser. De toute façon, au jour d’aujourd’hui, chaque fois que je sors des stands je m’améliore. Donc j’ai hâte d’y être. Je ne me suis pas fixé d’objectif précis : nouvelle catégorie, nouvelle moto, donc je prends les courses unes par unes. J’ai un repère puisque j’ai fait 14 à la course précédent alors que j’ai fait deux petites erreurs et que j’aurais pu faire mieux, mais pas d’objectif. Se mettre des objectifs, c’est se mettre la pression, et du coup, on arrive moins serein. Du coup, pour dans deux semaines, je suis confiant !
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On remercie Christophe pour sa disponibilité et ses réponses à nos questions, au plaisir de lui en poser d’autres pour que vous aussi, vous en sachiez plus sur lui !