Il est enfin arrivé, ce premier week-end moto de la saison, avec la première manche du Championnat du Monde Superbike, qui avait lieu sur le superbe circuit de Phillip Island, en Australie. Et il est passé bien vite ! Voici pour vous un résumé de la journée de Dimanche, théâtre de deux courses exaltantes et favorables aux pilotes Français, pour notre plus grand bonheur.
Dès le départ de la première course, le tracé met à l’honneur les performances des Aprilia, déjà en lumière lors des test des semaines précédentes. Laverty prend le meilleur départ puis s’échappe rapidement à plus de deux secondes de ses concurrents, bientôt rejoint par le Français Sylvain Guintoli qui en quelques tours, remonte de la 6ème à la 2ème position, s’illustrant notamment par un dépassement musclé sur la personne de Tom Sykes, en difficulté. La seconde Kawasaki, celle du haut-savoyard Loris Baz, est quant à elle prise à la lutte pour la 7ème position, suivie de près par la machine de Fabrizio, excellent durant tous les essais.
Alors que Baz dépasse les deux BMW et que la machine de Giugliano connaît un problème technique le contraignant à abandonner, Guintoli accroche définitivement la 2ème position, puisant dans les ressources de la meilleure machine du plateau pour remonter sur Laverty. Haslam lui, poursuit sa conquête du podium, mais c’est sans compter sur la fougue de Chaz Davies, bien décidé à briller lors de cette première course.
Malheureusement, au tour suivant, Carlos Checa alors en 5ème position rate son freinage et harponne involontairement la roue arrière de Marco Melandri, l’envoyant valser dans le bac à graviers. Une chute que Francis Batta, team manager Ducati Alstare, explique par le déficit de vitesse de la Panigale : « Carlos est obligé, afin de compenser, de pousser très fort sur les freins et dans les virages. » L’infortuné Espagnol perd connaissance et bien que la course ne soit pas interrompue, il sera transféré par hélicoptère à l’hôpital de Melbourne pour des examens complémentaires suite à une commotion cérébrale. Il ne garde aujourd’hui aucune séquelle de cette chute impressionnante, mais n’en a pas non plus le moindre souvenir. Mention spéciale à l’italien qui, pas rancunier pour un sou, s’est précipité vers son homologue ibérique afin de donner des consignes au commissaire de piste visiblement choqué, et est resté à ses côtés jusqu’à son évacuation totale du circuit. Un bien beau geste qui nous rappelle que la compétition s’arrête là où survient le véritable danger…
Projeté par l’incident à une excellente 5ème place, Loris Baz signe alors le meilleur chrono en course et menace Leon Haslam de la pointe de sa roue avant. Dans son sillage, son coéquipier laisse l’avantage à Fabrizio, qui passe bientôt le Français et s’engage dans une remontée sans merci sur le duo de tête.
Car en tête, le leadership n’est plus unique, et Guintoli ne tarde pas à prendre le meilleur sur l’Irlandais Laverty avant de s’envoler pour la première place ! Il monte sur la plus haute marche d’un podium alors 100% Aprilia : Guintoli – Laverty – Fabrizio.
Les deux autres pilotes tricolores signent pour leur part la 6ème place pour Baz et la 11ème place pour Cluzel. Si Jules est déçu et a connu des difficultés avec sa machine, Loris lui est largement rentré dans son objectif, qui était de faire partie du top 8.
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La deuxième course est à nouveau l’occasion de briller pour Sylvain Guintoli, qui dès la fin du premier tour prend l’avantage sur Eugene Laverty et s’échappe, pour mener plus de 75% du temps de course. Mais le pilote Irlandais, qui regrette d’avoir trop ménagé son pneu arrière en première course, ne compte pas le laisser partir comme ça, et met les bouchées doubles malgré la pression de l’Italien Melandri.
Tous les Français ne sont malheureusement pas aussi chanceux que Sylvain : 6ème dès le premier virage, et malgré un rythme prometteur, Loris Baz est percuté avant même la fin du premier tour par le maladroit Chaz Davies, qui pourra cependant repartir en course après un passage au stand pour remplacer son pneu arrière crevé. Loris lui est éliminé, et souffre d’un orteil malmené. Jules Cluzel, déterminé à clore ce week-end difficile sur un bon résultat, livre bataille à la Kawasaki de Tom Sykes pour une 6ème position qu’il conservera quasiment jusqu’au drapeau à damiers, puisqu’il terminera 7ème.
La course, bien moins passionnante et dynamique que la première, ne connaîtra pas de rebondissements majeurs jusqu’aux cinq derniers tours, ou les deux Aprilia se décident enfin à passer aux choses sérieuses, Guintoli laissant la part belle à Laverty qui prend définitivement la tête. Et cela se termine tel quel, avec un Français superbe second, et un podium clos par le courageux Melandri, puisque l’on apprendra plus tard que son accrochage avec Checa lui a valu d’aggraver sa blessure à l’épaule.
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Ce premier week-end est pour nous l’occasion de conforter notre analyse antérieure au début de saison quant aux forces en présence pour 2013.
En effet, il est clair que s’il n’avait pas été victime de cette terrible chute, Carlos Checa aurait sans aucun doute brigué les avants postes au guidon de sa Panigale, avec laquelle il a tout de même signé la première Superpole de la saison. Jusqu’à son accrochage, celui-ci était en prise avec les meilleurs, et prouvait qu’il avait la volonté de monter sur le podium. Pourtant, la faute qui l’a poussé, lui ainsi que Melandri, à chuter lourdement était de son propre fait : le signe qu’il n’était pas en pleine maîtrise de sa nouvelle machine ? Saura-t-il dompter la fougueuse Ducati qui n’a eu aucun mal à l’éjecter ?
Les Aprilia se sont évidemment révélées au plus haut : meilleure vitesse de pointe (impressionnante en ligne droite), mais également meilleurs pilotes, car il faudra comme prévu compter sur Laverty et Guintoli, deux protagonistes expérimentés et ayant souffert de la domination Max Biaggi la saison passée. Malgré cela, est-on mesure de penser que le Français pourra réitérer son exploit dès le prochain week-end à Aragon, ou sera-t-il écrasé par le poids de la très nombreuse concurrence ? Entamer une saison sur la machine du Champion du Monde en titre, c’est être l’objet de grandes attentes, et l’on ne connaît que trop bien l’incapacité bien française à gérer la pression. Guintoli fera-t-il exception à la règle ?
Marco Melandri quant à lui, si l’on excepte son manque de chance en première manche, a fait le travail en apparaissant, sur sa BMW, comme l’obstacle le plus important de l’hégémonie Aprilia latente. L’italien était donc bien là où l’on attendait, mais sa nouvelle faiblesse physique nous laisse dubitatif quant à la suite. Peut-on espérer que les sept semaines qui nous sépare de la prochaine course seront suffisantes pour qu’il récupère la pleine possession de ses moyens ?
Concernant les Français, outre le réjouissant week-end de Sylvain, dont on savait qu’il était un sérieux concurrent au titre, soulignons encore les performances respectives de Loris Baz et Jules Cluzel, dont les résultats tiennent de l’exceptionnel si l’on considère leur méconnaissance pour l’un du circuit, pour l’autre de sa machine. On regrette évidement l’écart de Chaz Davies, qui nous a privé d’un Loris en pleine forme lors de la seconde manche, mais on félicite Jules qui s’est classé deux fois dans les points pour sa première course dans la catégorie. Enfin, on s’autorise à questionner la capacité d’un pilote aussi jeune que Baz à offrir des résultats constants : on se souvient de Magny-Cours en 2012, où le pilote Kawasaki était parti à la faute dans les deux manches, la seconde étant éliminatoire. Pourvu que les secondes manches dans le bac à graviers ne deviennent pas une habitude pour le savoyard.
Petit bémol, enfin, pour Tom Sykes, que l’on attendait plus haut classé aux vues de sa saison passée. Estampillé meilleur pilote Kawasaki, il a de nombreuses fois été derrière son coéquipier en course, et s’il s’est arrangé pour terminer dans le top 5, rien ne garantit qu’il conservera cette régularité sur les prochains circuits. Une petite déception, donc, que l’on attribue pour l’instant à la concurrence bien plus nombreuse et déterminée que l’année passée.
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Concluons sur le constat heureux que le départ du grand Biaggi laisse un championnat plus ouvert et disputé qu’il ne l’a été depuis longtemps, et ce pour notre plus grand plaisir. Rendez-vous en Avril à Aragon !